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10/01/2007

Texte de Yolande Papetti-Tisseron dans le catalogue des trente ans des éditions Des femmes

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Texte de Yolande Papetti-Tisseron publié dans le catalogue des trente ans des Editions Des femmes :
En l'an 2005 il existera encore des fourmis travailleuses, des cigales friandes et chanteuses de divers plaisirs.
Mais un "roc" est là, souvent loin de Paris : Antoinette Fouque. Toujours très intègre, me semble t-il, pour ses choix. Telle une abeille, elle gère sa jeune et petite équipe : l'une fait ceci, l'autre fait cela, la troisième fait d'autres choses. Une activité de femmes mais... Lorsque je suis présente - contente - dans ce lieu, je m'amuse sérieusement.
 
Ne serait-ce pas la grande glycine violette dans la cour, une beauté présente.
 
Bref, cette atmosphère m'a conduite à quitter d'autres éditeurs "douteux" ou pervers peut-être et je suis revenue aux Editions Des femmes.
 
Le nouveau look des livres avec une forme de liberté et beaucoup d'esthétisme m'ont séduite à nouveau.
Alors telle une souris je me suis glissée dans ce gruyère pour y trouver les trous d'autres idées. Le psychisme vole tel un cerf-volant avec le corps. Jacques Derrida, Françoise Sagan sont venus me faire un léger clin d'oeil...
Personnellement, je ne peux qu'apprécier la ponctualité, la présence et l'éthique de cette "maison" que sont les Editions Des femmes, sinon je n'écrirais pas ce que je dis.
Alors, à quand mon autre manuscrit chez vous ? Allez Yolande Papetti-Tisseron au travail ! Cela me fait penser au psychanalyste Pierre Fédida qui avait évoqué quant à mon choix d'être psychanalyste ce beau mot : "métier". Inspiration à suivre...
Y.P.-T.
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Des étoffes à la peau de Yolande Papetti-Tisseron
" Le langage peut être défaillant pour exprimer le manque : manque de bras, de mains, de mots, de corps maternel. Manque éprouvé vraiment ou simplement à peine esquissé et dont le deuil reste interminable. Manque d'amour. Et les étoffes arrivent, intermédiaires réparateurs plus ou moins doux et douillets entre la mère et l'enfant, entre celle qui aurait pu donner et celui qui aurait eu à recevoir en tant qu'enfant... " Y.P.T.

Yolande Papetti-Tisseron est psychanalyste et formatrice de travailleurs sociaux. Elle est aussi peintre et expose régulièrement à Paris depuis 1999. Elle a préfacé les écrits de Bertha Pappenheim, Le Travail de Sysiphe (Des femmes-Antoinette Fouque, 1986). Elle est l'auteur de Du deuil à la réparation, également réédité en 2004.

06/01/2007

Stefan Zweig, lu par Fanny Ardant

Fanny Ardant lit
La Peur
de Stefan Zweig

Coffret 2 Cassettes - 25,50 €
Coffret 2 CD - 27 €La peur.jpg

" Lorsque Irène, sortant de l'appartement de son amant, descendit l'escalier, de nouveau une peur subite et irraisonnée s'empara d'elle. Une toupie noire tournoya devant ses yeux, ses genoux s'ankylosèrent et elle fut obligée de vite se cramponner à la rampe pour ne pas tomber brusquement la tête en avant...
Quand elle s'en retournait chez elle, un nouveau frisson mystérieux la parcourait auquel se mêlaient confusément le remords de sa faute et la folle crainte que dans la rue n'importe qui pût lire sur son visage d'où elle venait et répondre à son trouble par un sourire insolent. Déjà les dernières minutes auprès de son amant étaient empoisonnées par l'appréhension de ce qui l'attendait. Quand elle était prête à s'en aller ses mains tremblaient de nervosité, elle n'écoutait plus que distraitement ce qu'il lui disait et repoussait hâtivement ses
effusions. Partir, tout en elle ne voulait plus que partir, quitter cet appartement, cette maison, sortir de cette aventure pour rentrer dans son paisible monde bourgeois. Puis venaient les ultimes paroles qui cherchaient en vain à la calmer, et que, dans son agitation, elle n'entendait plus. Et c'était enfin cette seconde où elle écoutait derrière la porte, pour savoir si personne ne montait ou ne descendait l'escalier. Dehors l'attendait déjà la peur, impatiente de l'empoigner et qui lui comprimait si impérieusement le cœur que dès les premières marches elle était essouflée. "

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Irène est en proie au trouble le plus intense. Un trouble fait de désir et de crainte du désir, d'élan et de remords. Elle a le sentiment de trahir et redoute qu'une femme ne la trahisse. Déchirée entre son amant et son mari, elle ment, se cache, balbutie, s'évanouit.

Lorsque paraît en France La peur, en 1935, Stefan Zweig étonne par son art subtil d'explorer les sentiments qu'éprouve une femme, au plus près de leur réalité psychique corporelle. Cette nouvelle est une sorte de prélude aux romans La confusion des sentiments, Amok, Vingt-quatre heures de la vie d'une femme, où il déploiera le même talent.

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04/01/2007

"Du deuil à la réparation" de Yolande Papetti-Tisseron

tisseron.jpgYolande Papetti-Tisseron
Du deuil à la réparation

“Anna O” restituée à Bertha Pappenheim : naissance d'une vocation sociale.
145 p. - 16€ - 1986- 2004

Comment le désir d'aider naît-il chez une femme et comment ce désir détermine-t-il son engagement dans une activité ou une profession sociale ou paramédicale.
Freud et Breuer, les pionniers de la psychanalyse auraient pu tenter, dès le premier ouvrage de psychanalyse paru en 1895, d'approcher cette question avec Anna O, la première patiente des Études sur l'hystérie. Car Anna O était Bertha Pappenheim, une des grandes figures du service social allemand.
A l'opposé de la psychanalyse qui se construira sur la théorie des fantasmes, Anna O- Bertha Pappenheim connaît le poids, dans la vie, des traumatismes réels, notamment des deuils et des séparations. A partir d'Anna O enfin restituée à Bertha Pappenheim, Yolande Tisseron élargit sa réflexion aux motivations du don de soi et de l'engagement social chez les femmes : comment se fabrique une vocation sociale ? Quel rôle y joue le souci qu'éprouve l'enfant pour les préoccupations de ses parents ? Pourquoi la dépression chez les femmes mobilise-t-elle si souvent le désir de donner et d'aider ? Dans ce déchiffrage, la proximité des femmes avec la naissance et le rôle qu'elles ont joué dans les rituels de la mort apparaissent les prédisposer à une sensibilité particulière en ce qui concerne le deuil et le don.
Au-delà de ce champ social, subsiste l'interrogation fondamentale qu'arpente une femme, inlassablement, sur elle-même et sur ses géniteurs. D'une filiation à l'autre, Yolande Tisseron unit ici le parcours d'Anna O, première femme patiente de la psychanalyse, à celui de toute femme-assistante, axée sur la réparation des autres.

Yolande Papetti-Tisseron est psychanalyste et formatrice de travailleurs sociaux.Elle est aussi peintre et expose à Paris depuis 1999. Elle a préfacé les écrits de Bertha Pappenheim Le Travail de Sysiphe.

Bertha Pappenheim est la célèbre "Anna O." dont Joseph Breuer écrivait en 1907 : "Le cas d'Anna O., cellule germinale de toute la psychanalyse..."

Bertha Pappenheim fut aussi assistante sociale, et dirigea à partir de 1895 l'orphelinat juif de Francfort.

Pionnière active et persévérante, préoccupée de réparation, elle écrivit entre 1911 et 1912 "Le Travail de Sisyphe". La protection des femmes et des jeunes filles, la question de la traite des blanches, l'organisation sanitaire et sociale dans la communauté juive de Francfort, le sionisme, constituent la trame de ce courrier régulier et quotidien.

***
Du même auteur
Des étoffes à la peau

La "Jane Eyre" de toutes les adolescentes, disponible en livre audio (Avec la voix de Fanny Ardant)

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Fanny Ardant lit
Jane Eyre
de Charlotte Brontë
Coffret 2 Cassettes - 25,50 €
Coffret 3 CD - 32 €

C’est en 1847 que Charlotte, l’aînée des trois sœurs Brontë, publia Jane Eyre. Son succès fut immédiat et immense. La petite orpheline, privée d’affection, élevée dans une institution pour adolescentes pauvres, entrant comme gouvernante au château de Thornfield, est en effet une des figures les plus fascinantes du roman romantique. Et Rochester, qu’elle aime et dont le destin la sépare, est sombre, sarcastique, le double du héros né de l’imagination de la sœur cadette, Emily, dans Les hauts de Hurlevent.

L’amour et l’indépendance de la jeune fille, les préséances sociales et les revanches sur le passé, l’attirance pour les idéaux généreux, les messages de la passion triomphant du temps et de l’espace, les flammes de la folie, tels sont quelques-uns des thèmes qui se détachent sur un fond d’observation à la Dickens et qui sont emportés par un grand souffle romanesque.

03/01/2007

Du Balzac dans la Bibliothèque des Voix ! (Par Fanny Ardant)

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Fanny Ardant lit
La Duchesse de Langeais
de Honoré de Balzac

Coffret 2 Cassettes - 25,50 €
Coffret 2 CD - 27 €


“ Le Français devina que, dans ce désert, sur ce rocher entouré par la mer, la religieuse s’était emparée de la musique pour y jeter le surplus de passion qui la dévorait. Était-ce un hommage fait à Dieu de son amour, était-ce le triomphe de l’amour sur Dieu ? Questions difficiles à décider. Mais, certes, le général ne put douter qu’il ne retrouvât en ce cœur mort au monde une passion tout aussi brûlante que l’était la sienne. ” H.B.

C’est en 1833 qu’Honoré de Balzac écrit La duchesse de Langeais. A la base de ce roman, le désir de se venger de la marquise de Castries dont il était amoureux et qui l’avait joué. Dans cette transmutation de la réalité en fiction, l’idée de vengeance se perd, et s’élève un chant qui porte l’amour au-delà des règles communes.
Texte de passion sur la passion, où aimer et être aimé-e se joue à contre-temps dans la cruauté du monde, La duchesse de Langeais donne à l’amour la grandeur du sublime.

01/01/2007

Paroles d'Antoinette Fouque sur le site des Editions Des femmes (invention des livres audio)

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En 1980, j'ai eu envie de faire une "bibliothèque des voix". A l'époque, il n'y en avait pas en France et très peu, non plus, ailleurs. Je voulais dédier ces premiers livres parlants à ma mère, fille d'émigrants, qui n'est jamais allée à l'école, et à ma fille qui se plaignait encore de ne pas arriver à lire, et à toutes celles qui entre interdit et inhibition ne trouvent ni le temps, ni la liberté de prendre un livre.

Je crois que par l'oreille on peut aller très loin... On n'a peut-être pas encore commencé à penser la voix. Une voix, c'est l'Orient du texte, son commencement. La lecture doit libérer, faire entendre la voix du texte -qui n'est pas la voix de l'auteur-, qui est sa voix matricielle, qui est dans lui comme dans les contes le génie est dans le flacon. Voix-génie, génitale, génitrice du texte. Elle y est encryptée dirait Derrida, prisonnière dirait Proust.
La "bibliothèque des voix" compte aujourd'hui plus de 100 titres. Sont ainsi regroupés les voix et les textes de Nathalie Sarraute, Marguerite Duras, Julien Gracq, Françoise Sagan, Marie Susini, Danielle Sallenave, Georges Duby, et Catherine Deneuve, Isabelle Adjani, Arielle Domsbale, Jean-Louis Trintignant, Nicole Garcia, Michel Piccoli, Marie-Christine Barrault, Anny Duperey, Daniel Mesguich, Fanny Ardent ... prêtent leur voix à Madame de Lafayette, Diderot, Balzac, Colette, Proust, Freud ou Stefan Zweig...

"L'excursion des jeunes filles qui ne sont plus" de Anne Seghers, lu par Ariane Ascaride

Au-fil-d-Ariane-Ascaride1_articlephoto.jpg3328140020823_1_v.jpg"L’excursion des jeunes filles qui ne sont plus"
(nouvelle extraite du recueil "La Ruche", 1953)
Anna Seghers

Lu par Ariane Ascaride

Office 25/01/2007

En Allemagne, une classe de jeunes filles part en excursion. Sur le bateau qui les ramène à leur village en traversant le Rhin, une institutrice demande à l’une d’entre elles, Netty, de préparer pour un cours prochain le récit de cette excursion.

Netty est la narratrice, mais une narratrice un peu particulière puisque qu’elle a attendu longtemps avant de faire le devoir dont on l’avait chargée : c’est d’outre-tombe que le récit nous parvient, c’est une femme déjà morte qui nous raconte cette excursion qu’il lui est donné de revivre. Mais elle la revit en narratrice omnisciente qui connaît l’avenir réservé à chacun de ceux qui l’entourent ce jour-là.

Un triste avenir, car l’excursion a lieu quelques années avant la Première Guerre mondiale dans laquelle mourront certains des garçons rencontrés cet après-midi-là, garçons avec lesquels des jeunes filles ont déjà lié une relation amoureuse.

Et elle a lieu aussi avant la sombre période où tous devront choisir leur camp, sauf bien sûr ceux qui, parce qu’ils sont juifs, n’auront d’autre possibilité que fuir ou se cacher. L’amitié de deux jeunes filles, inséparables pendant l’excursion, n’y résistera pas : l’une, mariée à un nazi, refusera de protéger la seconde, persécutée en tant que juive. En aurait-elle fait autant si elle avait pu épouser le garçon tant aimé cet après-midi-là, s’il n’était pas mort en 1914 ?

L’omniscience de la narratrice colore son récit d’une teinte profondément nostalgique, presque mélancolique : la confrontation brutale entre le présent de l’excursion et l’avenir de ses participants fait apparaître cette journée comme une dernière parenthèse enchantée avant la noirceur des temps à venir. Et, pour la narratrice, la fin de l’enfance, cette enfance momentanément retrouvée puis de nouveau brusquement enfuie, coïncide avec la fin d’une période de bonheur serein et d’harmonie sans nuages.

Anna Seghers (1900-1983), romancière allemande, adhère en 1928 au parti communiste allemand, ce qui lui vaut d’être incarcérée en 1933 dans les prisons nazies. Elle parvient à s’enfuir en France, puis gagne le Mexique où elle est présidente du « Heine-Club » qui réunit des écrivains antifascistes de l’émigration. Elle revient en Allemagne en 1947 et devient très vite une personnalité officielle de la vie culturelle de la République démocratique allemande.

31/12/2006

Orpiment par Véronique Vassiliou : article "Jaune soufre" CAHIER CRITIQUE DE POESIE (1er semestre 2006)

Catherine Weinzaepflen
Orpiment
Des Femmes
186 p., 17 E

Véronique Vassiliou
Jaune soufre

"et tout le tableau - c'était mon but - comme un précipité de la détermination de cette femme."

Catherine Weinzaepflen, Orpiment

Artemisia est le titre d'un livre d'Anna Banti publié chez POL en 1989. Un film en a été tiré en 1997 par Agnès Merlet. Orpiment leur succède. Le motif en est le même, le traitement fondamentalement différent. Artemisia Gentileschi est née à Rome en 1593. Elle était femme et peintre, peut-être la première femme peintre de l'histoire de la peinture. Dans une écriture fluide, élégante et sensible, Catherine Weinzaepflen dessine une anamorphose. Sous les traits de cette femme peintre, un autoportrait affleure sur fond de peinture sociale. En effet, il s'agit aussi de toutes les femmes et de leurs difficultés d'être. Être a(i)mantes, mères et auteurs - de leur vie. Des "battantes" écrit Catherine Weinzaepflen. Ce roman n'est en aucun cas un pamphlet féministe rigide. Il me serait tombé des mains. Au contraire, il dresse intimement - grâce à un je narrateur - le portrait nuancé d'une femme sensuelle et délicate, combative et exigeante, douce et maternelle, contemplative et inventive de la tête aux pieds. Il exprime avec grâce des difficultés de conjugaison, des tensions - donc des liens - qui ne sont jamais des contradictions : être mère et travailler passionnément, être soi et être la compagne d'un homme, peindre et faire des listes de course, être fragile et devoir être forte, passer de la colère à la supplique.

Ce roman est avant tout une "composition". Il est parsemé de lettres, de dialogues aux allures de poèmes. Il est ponctué de tableaux jamais décrits mais magnifiquement rendus par la narration de leur facture, versant couleurs, versant parti pris, du point de vue de l'artiste qui reprend ici sa grande dimension étymologique : créateur / auteur.

Un roman à lire d'urgence donc, apaisant et juste.

02/12/2006

"Vivre l'Hisoire" de Simone Veil

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Simone Veil
Vivre l'Histoire
Entretiens avec Antoinette Fouque
1 Cassette - 16,50 €
1CD 18 €

" La profession d'avocat que j'avais choisie venait du goût de défendre des idées que je pensais justes et dont je trouvais qu'elles n'étaient pas suffisamment entendues. Au fond, je crois que toute ma vie, je pars en guerre... Ce qui m'importe, c'est la personne humaine, c'est l'homme, c'est la femme, le respect de l'homme et de la femme, de leur liberté, de leur dignité et de leur bonheur ; je ne conçois pas de possibilité de bonheur sans respect de la personnalité. C'est une sorte de combat pour une certaine forme de vie." Simone Veil

Dans ces entretiens réalisés en novembre 1985 avec Antoinette Fouque, Simone Veil parle de sa vie de femme politique.
Son enfance heureuse et libre, en dépit des difficultés économiques et de la sévère morale paternelle, auprès d'une mère aimée et admirée qui tout au long des années reste une grande figure lumineuse, son adolescence traversée par le Front populaire et tragiquement marquée par le nazisme, sa prise de conscience de sa judéité et du traitement des différences par les totalitarismes l'ont déterminée à s'engager activement dans la politique. Magistrat ou ministre, elle a toujours œuvré contre les abus de pouvoir pour l'instauration d'une loi, bonne en ce qu'elle respecte la dignité de la personne humaine et la liberté individuelle. Libérale, elle dit sa méfiance des idéologies, de l'embrigadement, du jeu politique qui sacrifie trop souvent l'authenticité à l'intrigue pour la prise de pouvoir ; elle dit son goût de la contestation et des joutes d'idées. Elle se montre un témoin attentif des grands bouleversements de notre époque, du mouvement de mai 68 comme des mouvements des femmes.
Une voix de femme se fait entendre qui interpelle le monde politique et témoigne, dans l'attention qu'elle porte aux autres, d'une vie simplement exemplaire..

01/12/2006

Interview Thérèse Clerc (www.capcampus.com)

06.jpghttp://www.capcampus.com/mode/mode-et-marques/therese-clerc-une-femme-d-exception-a6186.htm

Thérèse Clerc : une femme d'exception !
Elle nous livre son regard sur la société , les jeunes et la mode du haut de ses bientôt 80 ans !

Capcampus

Madame Clerc, après avoir créée la Maison des femmes, vous ouvrirez bientôt la maison des Babayagas. D’où et depuis quand vous est venue cette volonté de vous engager pour les femmes ?

Thérèse Clerc

Cela remonte à un bon moment maintenant. Mai 68 fut un vrai déclic pour moi. C’est à ce moment que j’ai véritablement pris mon avenir en main. Je n’étais pas heureuse dans mon mariage, alors après 20 années de vie commune, j’ai décidé de m’en aller. Ce fut une véritable libération pour moi. J’ai réalisé combien les femmes étaient oppressées, discriminées, dans une société qui ne les laissait pas vivre libres et dont le seul but était de prendre le contrôle sur leur corps.
Dès cet instant, je me suis plongée dans la lecture d’œuvres féministes, ai assisté à des débats et à des groupes de paroles de femmes. Je n’aimais pas l’école, reflet d’une éducation faite pour les hommes, alors je me suis formée toute seule

Capcampus

En quoi consiste la maison des femmes, quels en sont les objectifs ?

Thérèse Clerc

Il s’agit d’une association d’aide aux femmes. Nous leur apportons un véritablement soutient moral et les aidons à s’insérer dans la société en leur apprenant les bases de la législation. Nombre d’entre elles sont issues de l’immigration et ne sont pas informées des démarches administratives les plus rudimentaires. Souvent il s’agit de femmes opprimées par leur mari et enfermées dans des croyances que l’on leur a imposées depuis des millénaires. Alors nous essayons tant bien que mal de leur ouvrir les yeux et de leur faire prendre conscience de leur place dans la société. Ce qui compte en priorité est qu’elles acquièrent la joie de leur corps.

Capcampus

Vous n’êtes donc pas en accord avec leurs croyances ?

Thérèse Clerc

Pour dire simple, je déteste toutes les religions patriarcales. Il s’agit une fois de plus d’un moyen mis en place par les hommes pour prendre le pouvoir sur la Femme, et pour la rabaisser. Mais il n’y a pas que la religion ! Le pouvoir électoral en fait de même, ainsi que le corps médical. Tout est bon pour nous contrôler. Pour moi, le couple est le tombeau de la femme et la famille son cimetière.

Capcampus

Quels types d’activités proposez-vous alors à ces femmes?

Thérèse Clerc

Il existe différents ateliers : des cours d’alphabétisation, de français, de droit, mais aussi des cours de théâtre, de sport, etc. Nous tenons tout particulièrement à permettre à ces femmes de mieux comprendre ce qui les entoure pour qu’elles puissent enfin se libérer. Ainsi, nous les emmenons chaque semaine visiter les institutions et administrations. Notre dernière sortie était à la poste où un employé à généreusement accepter de leur enseigner les bases pour ouvrir un compte, remplir un chèque, etc. Chaque visite est un émerveillement pour nous comme pour elles !

Capcampus

Et n’importe quelle femme peut adhérer à votre association ?

Thérèse Clerc

Bien sûr ! Au début les femmes venaient peu nombreuses, aux environs de 3 ou 4. Aujourd’hui notre association a un tel succès que nous sortons parfois à 25 !

Capcampus

Comment parvenez-vous à gérer votre vie de famille et votre vie privée ?

Thérèse Clerc

C’est vrai qu’entre les interviews, les associations et la création d’autres projets ça n’est pas évident. Je n’ai pas une minute de libre. J’ai 14 petits enfants et je ne les vois pas très souvent. Mais je sais qu’ils sont fiers de leur grand-mère. Récemment j’ai tourné un film sur la sexualité des vieux. Je décolle d’ailleurs la semaine prochaine pour Montréal où nous avons été sélectionné au festival. Alors que certains passent leurs journées devant leur poste de télé, de mon côté, j’ai à peine le temps de l’allumer.

Capcampus

Mais à bientôt 80 ans, comment faites-vous pour être toujours si dynamique ?

Thérèse Clerc

C’est l’espérance qui me maintient en forme. J’ai l’impression que chaque jour est un pas de plus pour parvenir à mon rêve. Certaines choses me révoltent, comme les lois qui ne sont pas appliquées, et je me bats chaque jour pour que cela évolue.

Capcampus

Que pensez-vous de la jeunesse d’aujourd’hui ?

Thérèse Clerc

Malheureusement je constate aujourd’hui un manque d’engagement certain chez les jeunes. Les intellectuels se font de plus en plus rares, les réflexions sont trop peu nombreuses ou mal orientées.

Capcampus

Et les manifestations contre le CPE. N’était-ce pas là une forme d’engagement de la part des jeunes ?

Thérèse Clerc

Je pense que le débat sur le CPE n’a pas été assez mûri. Les jeunes ne se posent pas les bonnes questions. J’ai le regret de constater qu’ils s’accrochent à de vieilles lunes alors qu’il est grand temps qu’en arrive une nouvelle. Mille interrogations restent encore en suspend quand elles daignent être soulevées d’ailleurs. C’est pour cette raison que je souhaiterais créer un café intergénérationnel, qui ouvrirait le débat entre jeunes et seniors sur le travail, le temps choisi, les 35 heures, l’identité, la citoyenneté, etc.

Capcampus

Et concernant les femmes plus particulièrement qu’en pensez-vous ?

Thérèse Clerc

Les femmes restent encore naïves face à leur environnement. Elles n’ont pas conscience d’être manipulées. C’est regrettable mais je ne perds pas espoir que cela change un jour.

Capcampus

Et du point de vue de la mode quel regard y portez-vous ?

Thérèse Clerc

C’est un sujet qui me passionne. J’ai longtemps travaillé dans le textile et je pense que cela manque d’innovations. Pour nous les vieilles, il n’y a que très peu de choix et il en va de même pour les femmes rondes. Je réfléchis actuellement à travaillé sur de nouvelles matières plus amples. Le stylisme est un art qui m’intéresse véritablement. D’ailleurs nous organisons régulièrement des défilés de mode avec les femmes de l’association. Chacune vient habiller dans sa tenue traditionnelle. Cela donne lieu à de magnifiques défilés de boubous et djelabas. Un régal pour les yeux !

Capcampus

Pour finir quel message souhaiteriez-vous délivrer à nos lectrices ?

Thérèse Clerc

Tout simplement : méfiez-vous des hommes. Sachez lire entre les lignes. La grammaire même est un signe de notre invisibilité. Combien de noms n’ont pas de féminins ? Souvent l’anonymat du langage est le reflet de l’effacement de la femme, et cela jusqu’aux comptes les plus populaires.