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01/01/2009

Duong Thu Huong, lue par Catherine Deneuve ("Les paradis aveugles")

Catherine Deneuve lit

Les paradis aveugles de Duong Thu Huong - Extraits choisis par Phan Huy Duong - 1 cassette

K7 Duong Thu Huong.jpg

Duong Thu Huong
Les Paradis aveugles
Traduit du vietnamien par Phan Huy Duong
Préface de Michèle Manceaux

398 p. - 23 € - 1991

Hang, l'héroïne des Paradis aveugles, travaille en URSS, comme beaucoup de Vietnamiens. Appelée à Moscou au chevet de son oncle maternel malade, elle se souvient de son enfance et de l'histoire familiale telle qu'elle l'a vécue et telle qu'elle lui a été racontée. Un passé meurtri afflue où elle se sent exilée. Son Viêt-nam natal lui revient en mémoire, avec ses odeurs et ses images, et par dessus tout la visage de sa mère.
Le passé de Hang et de sa famille, c'est un pan de l'histoire du Viêt-nam, avec ses soubresauts et ses cruautés, avec ses trouées de lumière, ses souvenirs de douleur, en cette terre russe :

“ Dans ma mémoire surgirent des centaines de visages, ceux de mes amis, ceux des gens de ma génération. Visages rongés par le souci, délabrés, effondrés, grimaçants, poussiéreux. Visages éperdus, craintifs. Visages de la peur… La peur de ne pouvoir acheter quelques marchandises, la peur de ne pouvoir les envoyer, la peur d'apprendre qu'un vieux père, qu'une vieille mère n'avaient pas résisté à la misère en attendant ces misérables subsisdes… La peur qu'un dignitaire de l'ambassade ne… Visages du calcul. Il fallait penser à tout, (…) Penser à sa vie, aux lendemains douteux, à un avenir de brume sur l'océan… Comment pourraient-ils se confondre, dans la rue, aux visages des humains, de ceux qui jouissaient tranquillement de la paix, du bonheur, de la liberté ?… Avoir vingt ans, et sentir les rides des années sur son front, les cernes de la misère autour de ses yeux (…) Et la honte, et le mépris de soi sous le regard des autres… Une déchirure sans fin…
Un petit paradis naissait dans mon âme, sous la grande voile d'un bateau. Tout m'était alors cher, la voile rapiécée, le marchand grossier, le visage indifférent du passeur, celui, humilié, de la femme aux lourds paniers de pommes de terre. C'était ma part de ce monde, un petit coin de paradis s'attardant dans les derniers soirs de l'enfance. Le vent glacé, le clapotis de l'eau, le crépuscule mauve descendant sur l'horizon, les cadavres blanchis des éphémères flottant à la surface de l'eau… J'avais une mère… paradis unique, merveilleux de l'enfance. ”

" La Réforme agraire, comme un ouragan, avait dévasté champs et rizières, semé la désolation. La Section de rectification des erreurs fut naturellement incapable de recoller les morceaux. Elle réussit néanmoins à dégager un peu l'atmosphère sinistre qui étouffait le village. Ce fut un concert de rires, de pleurs, de soupirs. On se racontait publiquement les malheurs, les injustices subis. On invoquait à haute voix l'âme des innocents massacrés. Dans les demeures, les lampes à huile brûlaient toute la nuit. les maisons ouvraient leurs portes, les conversations roulaient, les réunions battaient leur plein... On réclamait le châtiment des délateurs, la réhabilitation de l'honneur bafoué, le règlement des dettes de sang... "

Les Paradis aveugles a fait partie de la dernière sélection 1991 du prix Femina étranger.

Duong Thu Huong
" Je voulais être chanteuse, mais je suis partie au front. C'était l'endroit le plus dangereux. J'ai toujours aimé le dangereux. "
Duong Thu Huong, née en 1947, est une combattante. A vingt ans, elle se porte volontaire pour aller, avec le groupe " Chanter plus haut que les bombes ",
sur le front de Binh Tri Thien, dans la province du Viêt-nam alors la plus bombardée par l'aviation américaine. En 1979, elle se trouve parmi les premiers écrivains à la frontière septentrionale, lors de l'agression chinoise.
Elle ne voulait pas devenir écrivain.
" Cela m'est arrivé par hasard à cause de la douleur. ", dira-t-elle à Michèle Manceaux qui l'a rencontrée en 1991.
Auteur de nouvelles, romans, pièces de théâtre, poésies, mais aussi d'articles, Duong Thu Huong est actuellement l'écrivain le plus populaire du Viêt-nam. Par son courage et sa générosité, elle a ouvert la voie à la " renaissance de la littérature vietnamienne " qui tente de restituer au langage son humanité.
Le 14 Avril 1991, les autorités vietnamiennes l'arrêtent. En France, une pétition signée par de nombreux intellectuels français et vietnamiens demande sa libération immédiate. Duong Thu Huong sera libérée en Octobre 1991.