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25/01/2008

Lydia Harambourg évoque Colette Deblé dans La Gazette de l'Hôtel Drouot (25.01.08)

La Gazette de l'Hôtel Drouot 25.01.08

De musées en galeries - Le magazine

(...)

Colette Deblé
Des femmes

Colette Deblé aime à la fois le papier et les mots. Aussi la voit-on souvent oeuvrer aux côtés de poètes pour composer à plusieurs mains des livres dont elle émaille les pages de ses dessins, lavis et aquarelles. Les manuscrits à peintures, les livres d'artiste ponctuent son parcours balisé par les images de la femme à travers le temps, ce qu'elle appelle un "essai plastique sur le regard des autres". Colette Deblé a entrepris voici quelques années une sorte d'inventaire des femmes à travers l'histoire, la littérature, l'art. Des femmes célèbrent, qui traversent les mythologies comme la religion - les saintes, les héroïnes, les aventurières, les reines, les artistes, les écrivains.... - ; elles se retrouvent toutes au rendez-vous de la farandole tissée par l'artiste. Aujourd'hui, à la faveur de l'agenda pour l'année 2008, elle égrène chaque jour une figure féminine sortie d'un tableau, empruntée à une iconographie populaire ou identifiée. De Santa Casilda à Bethsabée en passant par Olympa de Gouges, Maryse Bastié, Rosa Luxembourg, Diane et Sappho, Frida Kahlo, Marguerite Duras, Taslima Nasreen...., ce sont autant de figures rayonnantes, mystérieuses, amoureuses qui jalonnent le calendrier romain. Trois cent soixante-cinq lavis en couleurs ont investi les murs d'une nouvelle galerie, vitrine des Editions des femmes. Colette Deblé se révèle différemment dans la couleur, dense, chaude, lyrique, pour exprimer une présence unique.

Image Colette Deblé, Madonna del parto, Piero della Francesca, chapelle du cimetière, Monterchi (Arezzo), Italie, lavis pour Gravidanza

Des femmes espace-galerie, impasse des Deux-Anges et 35, rue Jacob, VIème. Jusqu'au 15 février. Agenda 2008, Colette Deblé Antoinette Fouque, Editions des femmes

23/01/2008

Café Babel 23.01.08 (par Mathilde Magnier)

http://www.cafebabel.com/fr/article.asp?T=A&Id=2997

Mathilde Magnier - Paris - 23.1.2008
Analyse
Féminisme : la révolution rose
Point de rupture dans l’histoire des femmes, Mai 68 avait aussi ses militantes. Celles d’hier et d’aujourd’hui témoignent et racontent leurs combats.
Slogans féministes dans une manif parisienne (Photo : DR/Jean-Claude Seine) Un vent de révolte dirigé contre une société patriarcale et un brin misogyne souffle dans une société engoncée dans un carcan social, politique et culturel, trop lourd et trop étroit. C'est mai 68, une période où nos jolies mamans, du Beauvoir plein la tête, se sont engouffrées dans la brèche contestataire en faisant claquer haut et fort l’étendard de la libération et de l’émancipation des femmes.

Avortement, contraception, parité et égalité des sexes… Autant de concepts qui semblent aujourd’hui familiers. Mais cela n'a pas toujours été ainsi. Le Girl Power dont se revendiquent certains groupes de pop épicée made in UK, n’aurait probablement jamais pu faire autant d’adeptes sans le travail acharné de nos aînées.

Mouvement de libération des femmes

Et pour cause : « En quarante ans, plus a été fait pour les femmes qu’en deux mille ans d’histoire », rappelle Antoinette Fouque, psychanalyste et politologue, ancienne eurodéputé et personnalité phare du Mouvement de Libération des Femmes (MLF), groupe emblématique créé en 1968. Mais, dans les années 60 et 70, que signifiait être féministe ? Quelles étaient les attentes et les revendications de ces femmes militantes de leur propre condition ?

En réalité, le terme de « libération » était sur toutes les lèvres et surtout celles des femmes. Françoise Picq, maître de conférence en science politique à Paris Dauphine et militante de la première heure au MLF, décrit, avec une pointe de nostalgie, cette atmosphère si particulière : « Le contexte du moment était explosif », se souvient-elle. « Il était difficile d’être femme dans une société où nous n'existions qu’en tant qu’épouses, mères ou filles », poursuit Antoinette Fouque.

A partir des événements de 1968, la conception de la femme dominée par la « puissance paternelle » vole en éclat et est abolie en 1970. Les féministes rejettent l'idée d'être enfermées dans un rôle d’asservissement domestique. Les militantes du MLF prennent la tête de la revendication. Dans leurs coeurs, la révolution des mentalités et des moeurs n’est pas nécessaire : elle est incontournable.

« Le Mouvement de Libération de la Femme fut un véritable raz-de-marée, car il correspondait à un sentiment de révolte et de lassitude généralisé chez les 'nanas' de l'époque face à une mysoginie ambiante », explique Antoinette Fouque. « Nous étions des filles de la République. Nous avions reçu la même éducation que les garçons, et sur les bancs de la fac, nous nous sentions leurs égales. Or, une fois mariées ou enceintes, il n'en était plus rien. Nous étions toujours sous le coup des lois qui faisaient de nous des mineurs. Une femme n'avait pas le droit d'ouvrir un compte en banque sans l'autorisation de son mari ! », insiste-t-elle. « Nous réclamions une révolution culturelle, une révolution de civilisation où hommes et femmes devaient être égaux en droits et en possibilités ».

Plus tard, l'association Choisir La Cause des Femmes est créée, en 1971, par Simone de Beauvoir et l’avocate Gisèle Halimi. Le Mouvement Français pour le Planning Familial est également fondé en 1956. Il permettra aux femmes de penser et façonner leur destin pour elles et entre elles.

Cheval de bataille : l'interruption volontaire de grossesse

Alors que le droit à la contraception est obtenu dès 1967, d'autres revendications se bousculent. Pêle-mêle : le droit au travail et à l’égalité salariale, la parité et la fin d’un système de domination masculine... Et surtout, le droit à l’avortement, finalement voté en 1975 grâce à la loi Veil. La question de l'interruption volontaire de grossesse (IVG) est le point crucial du combat féministe. C'est le cheval de bataille du MLF. Son mot d'ordre : « Un enfant, si je veux, quand je veux ». Pour la jeune historienne Bibia Pavard, « l’action a été déterminante à cet égard. On a reconnu aux femmes le droit d’avoir le choix ». Elles reprennent disposition de leur corps et de leur sexualité. Et puis surtout, elle maîtrise leur fécondité, peuvent accepter, ou non, la maternité.

« C'est un combat que nous devions mener seules, entre femmes, dans un environnement non-mixte. Il fallait que nous puissions accéder librement à la formulation de nos désirs, que nous puissions parler de tout, et particulièrement de ces choses intimes que nous n'avions, jusque là, pas le droit de dire», précise Antoinette Fouque.

Près de quarante ans plus tard, qu’en est-il de la cause féministe et de l’héritage de 68 ? Qu'est devenue la lutte engagée par les virulentes et déterminées demoiselles de ces années-là ? Aujourd’hui, les associations sont nombreuses et continuent de se faire entendre pour défendre les droits des femmes. Preuve que « si le travail accompli par les femmes de 68 a été considérable, beaucoup reste encore à faire » comme le souligne Sihem Habchi, l’actuelle présidente de l'association Ni Putes, ni soumises. « Les acquis de 68 se sont arrêtés aux portes des quartiers populaires, où trop souvent, les femmes, en particulier celles issues de l’immigration, n’ont aucune conscience de leurs droits. »

De même, pour les militantes de Femmes Solidaires. Pour cette autre association, il est urgent de mobiliser les jeunes générations, de les amener à continuer le débat et de lutter contre les régressions. Car les réformes d’hier peuvent être perdues demain. Ailleurs, comme chez Mix-Cité, on mène un combat des mentalités, contre le sexisme, mais dans lequel les hommes doivent être impérativement impliqués. Ainsi les temps ont changé : nos sociétés ont profondément évolué. Mais la défense des droits des femmes semble rester furieusement d’actualité.
Mathilde Magnier - Paris - 23.1.2008 |

Thérèse

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22/01/2008

Antoinette va à la générale de "Bérénice" (avec son amie Carole Bouquet) - Le Figaro 22.01.08

carole-bouquet.jpg 22.01.08

Le Figaro et vous

Trois ministres pour une tragédie

Station de métro La Chapelle, à Paris, dimanche soir : on se bouscule sur le trottoir. Jacques Rigaud, Georges Kiejman, Valérie Lemercier, Guy Bedos, Philippine de Rothschild, Jean-Pierre de Beaumarchais, Antoinette Fouque, Marina Vlady... La soirée la plus people du moment mise au point par Micheline Rozan, la grande admiratrice de Peter Brook aux Bouffes du Nord ! Trois ministres de la Culture sont là. L'actuelle, Christine Albanel, et deux anciens, Jacques Toubon et Renaud Donnedieu de Vabres. A la sortie du spectacle, la photo s'imposait ! Et pour qui cette presse, cette liesse ? Pour un concert de Carla Bruni ? Non, mais pour la plus belle des tragédies de Racine, "Bérénice", avec Carole Bouquet dans le rôle-titre, Lambert Wilson qui met en scène, joue Titus, dirige son père, le grand Georges Wilson, ovationné, et Fabrice Michel, Antiochus.

21/01/2008

Trois soirées sinon rien : invitation pour le 29 janvier, le 1er et le 7 février (à partir de 18 h 30, au bout de l'allée fleurie, 35 rue Jacob à chaque fois)

Antoinette Fouque vous invite à l’Espace des femmes (35 rue Jacob, Paris 6ème) à assister dès 18 h 30 à trois soirées de lectures, à la rencontre de femmes qui pensent, agissent et écrivent…

Des sujets aussi captivants que différents (histoire, politique, art) permettront aux intervenantes de débattre devant vous ainsi que de vous dédicacer leurs livres.

Mardi 29 janvier : Spéciale Danielle Mitterrand – Avec Danielle Mitterrand, fondatrice de France-Libertés, auteur de Le livre de ma mémoire (Jean-Claude Gawsewitch, 2007)

Vendredi 1er février : Quel espoir pour les femmes en terre d'Islam ? – Avec Martine Gozlan, journaliste à Marianne et auteur de Le désir d’Islam (Grasset, 2005) et Le sexe d’Allah (Grasset, 2004) et Sophie Bessis, auteur de Les arabes, les femmes, la liberté (Albin Michel, 2007)

Jeudi 7 février : Les frères Giacometti, avec Claude Delay, auteur de Giacometti, Alberto et Diego (Fayard, 2007) et France Huser, journaliste au Nouvel Observateur et auteur de La fille à lèvre d’orange (Gallimard, 2006)

Patrizia Cavalli par Pascal Gibourg ((www.inventaire-invention.com) 21.01.08

http://www.inventaire-invention.com/lectures/gibourg_cavalli.htm

Mes poèmes
ne changeront pas le monde
Patrizia Cavalli
éditions Des Femmes, bilingue,
2007, 489 pages, 23 €


Lectures

Jusqu'à il y a encore peu, comme aux enfants, on interdisait la parole aux femmes, et la maîtrise qui va de pair, en tout cas qu'on lui associe souvent. Bien sûr, l'exercice de la parole est en partie lié à l'exercice d'un pouvoir, mais en donnant la parole aux femmes – plutôt en acceptant progressivement de les voir se l'approprier – on (c'est-à-dire les hommes mais aussi les femmes qui pouvaient ne pas trouver très bien de dire ce que l'on pense, a fortiori quand ça dérange - il y a des choses qu'on ne dit pas, n'est-ce pas ?) s'est donné la possibilité de faire une découverte, notamment dans le domaine de la littérature ou de la poésie, nouveauté qui consiste à voir dans l'usage de la parole non pas l'occasion d'exercer une forme de domination mais d'encourir un risque dont la forme ultime serait comme l'envers de la conquête : je veux parler de la reconnaissance d'une perte. Pourquoi est-ce aux femmes que nous devons de redécouvrir cette vérité première – elle est ancienne, hors d'âge, la culture n'a jamais fait que travailler à sa dissimulation –, eh bien pour la raison qu'elles ont l'art d'aborder le domaine des sentiments et du vécu amoureux avec une sensibilité, voire une simplicité, qui généralement font défaut aux hommes, plus fiers, et davantage coupés de leurs émotions au nom d'une éducation privilégiant la froideur et la raison, le calcul, et encore une fois la maîtrise, la poigne. Oui, à nous autres garçons ce n'est que depuis peu qu'il nous est permis de faire cas de nos larmes, et encore cela passe-t-il souvent pour de la mièvrerie. Un homme ça mange de la viande et ça ne pleure pas. Pour ma part, je considère comme précieuse l'œuvre qui ouvre des voies à des pensées ou des affects bloqués quelque part dans les circuits du corps, qui libère et fait circuler en moi (voire au dehors) ce qui ne demandait qu'à être, qu'à sortir du néant.

Patrizia Cavalli est une de ces voix conduisant à l'essentiel. Ce n'est pas un hasard si l'amour occupe une place si cruciale au sein de ses écrits. Ce qui existe à peine, ce qui est rêvé, désiré tout autant que perçu ou palpé. Mais comment le saisir, l'approcher sans le faire fuir ? Un jeune chevreuil sortant à peine du bois ne serait pas plus saisissable. Les poèmes de Cavalli ont cette fulgurance, cette fugacité, cette immédiateté qui expriment à la fois l'intensité et l'illusion, l'ambiguïté de ce qui est. Abstraite sa poésie, métaphysique ? Oui, à force de parler des corps, des désirs et des émotions. Ce n'est pas là le moindre des paradoxes et la moindre des énigmes de la vie que d'adjoindre ou de mêler le plus consistant au plus éthéré, le plus vital au moins évident. Paradoxe de l'instant, fait de rêve et de bouleversement, de vacillement, d'émerveillement. Patrizia effleure, pique ou épingle. Elle est parfois cruelle, mais toujours délicate. Telle est la nature de son travail, et encore ce mot de « travail » ne convient-il guère. Il dit trop l'effort, la contrainte et la sueur, bien qu'il ait le mérite de mettre l'accent sur la part physique, concrète, de l'activité poétique, sa part rythmique et nerveuse. Sans oublier une dimension ludique, présente dans l'esprit espiègle de l'auteur, mais aussi dans une pratique non systématique du jeu de mots. Poésie ironique ou humoristique pour ne pas être trop sentimentale, voire pathétique, se faisant légère pour ne pas être trop grave, distante pour ne pas paraître trop blessée, poésie directe sans être toujours explicite, courageuse, sans chichi et sans fioritures, poésie dense, philosophique et vagabonde, instruite de l'éphémère comme de l'infime, poésie en équilibre, funambule, maître en vertige et en figures peintes au-dessus du vide :

« Chaque jour maintenant dans chaque instant
dans chaque mot il y a toute ma vie,
gloire ou ruine me vainquent à l'excès.
L'amour est présomption de son état. »

En 2002, Lidia Breda a eu la lumineuse idée de publier le « Toujours ouvert théâtre » de Patrizia Cavalli dans la Petite bibliothèque Rivages. C'est comme ça que je l'ai découverte. Par chance. Il est vrai que la signature d'Agamben en quatrième de couverture ne pouvait que m'encourager à aller plus loin. On retrouve le philosophe dans « Mes poèmes ne changeront pas le monde », cette fois comme préfacier. Patrizia Cavalli serait-elle une poétesse pour intellectuels ? Certes pas, ce serait très réducteur que de penser cela, même si le noyau intime de sa poésie est je crois en puissance d'attirer des intelligences moins émotives, comme si cette poésie à la fois singulière, franche et économe, dévoilait un envers à des êtres moins capables de simplicité (je me répète) et leur fournissait comme un complément inespéré, un double salutaire.
Une des forces de Patrizia Cavalli consiste à exposer une intimité, une « domesticité » même, sans jamais se raconter. Un coup de projecteur éclaire une scène, ou une pensée, mais toujours rapidement et incomplètement. Au lecteur de recomposer ou de laisser son imagination vagabonder à la suite de la vérité échappée. Pas d'explication, pas d'analyse, pas de discours, mais des traits saillants ou des fragments colorés. Le poète est moins proche du romancier que du peintre ou du photographe. Il décrit et exploite son sens averti du détail. Son « moi » n'est pas tant la matière de son inspiration qu'un point de vue privilégié. Le « je » remplace l'objectif ou la caméra, le pinceau ou le couteau. Aussi nulle saturation narcissique mais plutôt la générosité de quelqu'un qui accepte de dévoiler des pans d'une réalité à la fois intime et personnelle en même temps que commune et banale. « Je » dissous et traversé, dépassé, surmonté, oublié.
Un poème long toutefois, le seul avec La journée atlantique à porter un titre, les autres désignant des ensembles qui sont autant de mouvements d'un chant général. Et qui s'appelle : Le moi singulier qui n'est qu'à moi. Pour une fois, la poétesse s'explique et répond indirectement aux critiques de ses amis qui lui reprochent précisément de ne plus voir les autres à force de s'observer soi-même.

« ...
Si quand je parle je dis toujours moi
ce n'est pas attention particulière et malsaine
à moi-même, ce n'est pas complaisance,
bien au contraire je ne me considère
qu'un exemple quelconque de l'espèce,
et donc ce moi verbal n'est autre
qu'un moi grammatical.
Et quand bien même ce moi
serait mon moi charnel, me voici encore
exemple, certes peu enviable, plutôt
mal réussi, du corps primordial.
… »

Mais on ne convaincra pas ceux qui vivent et sentent autrement. Mes poèmes ne changeront ni le monde ni les gens.

Le « moi » est comme une loi, une convention, psychologique, philosophique, grammaticale, on pourrait ajouter juridique, la question de la responsabilité (du responsum , de la réponse) lui étant consubstantiellement associée. Mais que se passe-t-il quand cette loi ne vaut plus, quand dans cet adagio que serait la vie la loi s'est perdue (la formule est de Cavalli) ? Peut-être entre-t-on en poésie ou en tout cas s'est-on suffisamment dépouillé de soi pour pouvoir y entrer. Mais ce « je » alors, qui traditionnellement célèbre ou se plaint ? Un reste, un résidu, un vestige conventionnel à partir de quoi la langue est ressuscitée. Ce n'est pas même une main, plutôt un gant, mais cela suffit pour redistribuer le monde et ses catégories, à ceci près que dès que le poème rencontre le monde ordinaire qui prend volontairement les conventions pour des faits bruts, alors le malentendu commence, et le débat, et la fatigue. Le poète est en équilibre entre un monde conventionnel auquel il fait, pour les bienfaits de son œuvre, peu ou prou semblant de croire, et un monde de choses et d'êtres physiques et métaphysiques difficilement contestable, qu'il soit prodigue en bonheurs ou en déceptions. Le poème vacille, et s'il détient une vérité, elle est là, dans le fait de tituber, de chanceler, dans cet espace, ce théâtre.
Une chose restera toujours difficile à accepter, c'est que la scène de l'art puisse peser autant dans la balance que la scène dite de la vraie vie. A fortiori un art de signes, de traces, comme l'écriture ou la peinture (c'est plus ambigu avec le spectacle vivant). On voudrait que la vie soit poétique et l'art vivant, on ne veut pas voir le prix à payer d'une telle accolade, le brouillage des catégories, l'abandon de quelque chose qui doit bien remonter jusqu'à la croyance (et pas seulement au sens religieux du terme, je le dis au sens où la croyance est le ciment de nos représentations).
La poésie la plus fragile devient alors la plus subversive, mais d'une subversion douce que beaucoup ne voient pas, et pour cause, ils n'entendent pas le silence entre les mots qui défait les nœuds qui retenaient l'embarcation.
C'est parti, on s'en va, il n'y a plus qu'à suivre le mouvement de la dislocation et de l'enchantement. Il y a bien une forme de renoncement au fondement de cette élévation, de cette libération qui parfois est si étouffante, une forme d'acquiescement. Et que dit-elle ? Elle ne promet rien, elle est comme libérée de l'engagement. On trouvera cela léger, insignifiant. A moins que cela laisse songeur et qu'on éprouve en même temps qu'une forte empathie une sorte d'inquiétude, presque agréable, étrangement consolatrice. La voix des prophètes s'est tue, il reste celle des éléments et des origines balbutiantes, le fondement désagrégé de nos rêves de construction les plus fous et les plus ordinaires :

« Sylvie, Valérie, Stéphanie, Anne-Marie,
connais même pas, qui c'est ?
Laissons tomber, je renonce, pas la peine.
Si ça se trouve elles sont belles, douces et hardies.
Mais j'y crois pas. Et puis qu'est-ce que j'en ferais ? »

17/01/2008

Soirée "Le Chat aux yeux d'or" avec Fadéla M'Rabet au Centre Culturel Algérien le 27 février 2008

Dès 19 h, le 27 février 2008 :

http://www.cca-paris.com/

Adresse : 171 rue de la Croix Nivert dans le 15ème

Venez nombreux !

Plumes rebelles, 8ème Salon du livre de Rennes, 2 et 3 février 2008

Présence des éditions Des femmes au 8ème Salon des Plumes rebelles de Rennes :

http://www.plumesrebelles.org

14/01/2008

"Une chambre à soi" de Virginia Woolf (livre audio)

Maria Mauban lit Une chambre à soi de Virginia Woolf
1 Cassette - 16,50 € / 1 CD - 18 €

Une chambre à soi.jpgPartant de l'analyse des interdits misogynes, solides remparts d'une supériorité masculine dont la réalité paraît sérieusement ébranlée, Virginia Woolf définit les conditions d'existence et la spécificité de la création pour les femmes. Il faut d'abord "une chambre à soi", dont la portée va bien au delà du matériel. "Il suffit d'entrer dans n'importe quelle chambre de n'importe quelle rue pour que se jette à votre face toute cette force extrêmement complexe de la féminité ... Car les femmes sont restées assises à l'intérieur de leurs maisons pendant des millions d'années, si bien qu'à présent les murs mêmes sont imprégnés de leur force créatrice."

11/01/2008

Animaux de combat par Christine Clerc (Valeurs actuelles du 11/17.01.08)

LE CARNET DE CHRISTINE CLERC

ANIMAUX DE COMBAT

(...)

Ma génération doit beaucoup, paraît-il, à Simone de Beauvoir dont on célèbre le centenaire : elle fut une femme libre, vivant sans entraves ses liaisons avec Sartre, Lanzmann et Algren ; elle milita pour l'avortement et écrivit : "On ne naît pas femme, on le devient." Je trouvais cela très fort. Aujourd'hui, je crois au contraire avec Antoinette Fouque la fondatrice du MLF, qu'il est "impossible de se libérer en niant la différence des sexes" - et d'abord, la maternité. Pour l'avoir oubliée, nous avons pris beaucoup de retard dans le combat qui devrait être prioritaire : afin que des millions de mères seules aient les moyens matériels et intellectuels d'élever leurs enfants. Simone de Beauvoir s'en souciait-elle seulement ? Je relis "La force des choses" et n'y trouve qu'une bourgeoise intello préoccupée de sa propre personne, confessant dans les années 1940 : "Ce que je n'ai pas découvert, c'est la manière de traduire par des actes mon opposition au nazisme" et partant, en 1945 - année de rationnement en France - , effectuer une tournée de conférences en Espagne et au Portugal. Là-bas, elle trouve des magasins "au luxe d'un autre âge" et s'achète tenues de cocktail et manteaux de fourrure. Dans la rue, cependant, elle voit des enfants nus et "scrofuleux". "La bourgeoisie portugaise, note t-elle, supportait très sereinement la misère des autres." Elle aussi. Sa règle d'or : "Je ne m'appliquais pas au dégoût, ni à la compassion." En sept cents pages, pas une once de générosité ! Beauvoir aura incarné, en somme, la "gauche ragondin".

(...)