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18/06/2010

Emmanuel Pierrat, Charles Juliet, Hélène Martin... seront heureux de vous rencontrer lors du Marché de la Poésie (stand F1 des éditions Des femmes-Antoinette Fouque, du 18 au 20 juin 2010, Place Saint-Sulpice)

Les éditions Des femmes-Antoinette Fouque vous invitent à rencontrer sur leur stand F1 (à l'occasion du Marché de la Poésie, Place Saint-Sulpice, 75006 Paris, 01.42.22.60.74)

 - Emmanuel Pierrat :Troublé de l'éveil, La Bibliothèque des voix / Vendredi 18 juin à 15h00

 - Françoise Collin, On dirait une ville / Samedi 19 juin à 15h00

 - Chantal Chawaf, Je suis née / Samedi 19 juin à 16h00

 - Charles Juliet et Valérie Dréville, J'ai cherché, La Bibliothèque des voix / Samedi 19 juin à 17h00

 - Jacqueline Merville, Presque africaine / Dimanche 20 juin à 14h00

 - Hélène Martin, Journal d'une voix, La Bibliothèque des voix / Dimanche 20 juin à 15h00

31/05/2010

Bertrand du Chambon a aimé "Presque africaine" de Jacqueline Merville (Le Magazine des Livres, mai-juin 2010)

mervillephoto.jpg

Deux lectures avec dédicace de "Presque africaine" :

 - Le samedi après-midi 15 mai à Saint Remy de Provence dans le cadre Lire en Mai

 - Le mercredi 2 juin à partir de 18 heures à la librairie Le Bal des Ardents, 17 rue Neuve à LYON 69001.

Et un article splendide dans Le Magazine des Livres -

Mai-Juin 2010

Les livres que vous n'avez pas lus  par Bertrand du Chambon : Une petite qui vaut bien des grandes !
 
Ninon a grandi. Moon est une vendeuse de sourires.
 
Paumée, clocharde, oui, sans doute. Mais avec un sourire qui est grand, un petit côté crâneur, et un oeil qui perle vers le soleil. Elle tend la main à Paris, du côté de Saint-Séverin. Si vous n'avez jamais été pauvre, lisez Maud Lethielleux. Déjà, l'an dernier, je vous avais conseillé son premier roman, Dis oui, Ninon ; vous devez le relire et découvrir celui-ci : D'où je suis, je vois la lune.
 
Moon vit dans la rue, et laisse traîner les cahiers où elle se raconte. Quelqu'un s'en empare, les met au propre et lui dit qu'elle est un écrivain : "Le type dit que je suis un auteur et ça me fait une belle jambe étant donné que je ne sais pas à quoi ça ressemble, un auteur. Quand il me demande où j'habite j'ai un instant d'hésitation, j'explique que je suis en plein déménagement, ce qui n'est pas faux puisque je ne sais pas où je vais dormir demain." Très juste ! Même nous, les auteurs, nous ne savons pas "à quoi ça ressemble, un auteur". En tout cas, ça peut ressembler à Maud Lethielleux. Lisez-la : c'est une petite qui vaut bien des grandes.
Une grande, mais vraiment grande, et qui a déjà pas mal de livres à son actif, et qui a peint des toiles magnifiques, et qui nous conte depuis longtemps ses voyages initiatiques, sa vie, ses errances : c'est Jacqueline Merville.
 
Je suis un peu honteux de devoir vous présenter Jacqueline Merville, au cas où vous n'auriez rien lu d'elle : c'est un écrivain magnifique, une auteure, un poète, une femme, une... les mots sont insuffisants ici. Cette femme est un grand écrivain. Depuis La Ville du non, en 1986, et de nombreux romans, récits, poèmes, elle a sculpté une oeuvre étrange, digne et grave. Une statue égyptienne. C'est Jacqueline la Merveille ! Et bien sûr, son histoire personnelle, parfois fidèlement restituée dans certains de ses textes les plus récents, nous surprend par l'audace mise en pratique, assumée, vécue : elle vit comme elle veut. Elle voulait partir, elle est partie. Elle voulait faire face à la souffrance du monde, elle l'a fait. "Vagabonde sur la terre", dit son éditeur L'Escampette, sur la quatrième de couverture de Voyager jusqu'à mourir. Ou voyager jusqu'à vivre ? Car vivant depuis presque vingt ans en Asie, surtout en Inde, elle a, avec son compagnon, fréquenté les chemins des pèlerins du nord au sud, avec bien peu de moyens et de volonté de fer. Et puis un jour... Oh, ce n'est pas racontable... Elle, elle sait le raconter. Dans The Black Sunday, elle a dit l'impensable : elle se trouvait sur les côtes de l'Inde au moment où est survenu le tsunami. Elle raconte cela : le tsunami.
 
Et voilà qu'aujourd'hui, alors qu'on pensait qu'elle avait vécu là-bas une expérience indépassable, elle avoue qu'elle en avait déjà vécu une auparavant, en Afrique. Elle dit seulement : "un "supplice". Elle n'utilise pas les mots habituels : torture, viol ; et elle raconte comment elle a survécu. Comment ne pas demeurer une demeurée : une victime. Dans ce texte superbe, Presque africaine, elle parle en son nom seul, et voici que depuis quelques semaines des femmes lui écrivent : merci d'avoir dit pour nous ce que nous ne pouvons pas dire.
 
Pourquoi avoir vécu tout cela ? C'est un mystère. Jacqueline Merville s'y confronte, et ose avancer encore : "Avais-tu besoin d'être, un instant, hors de la femme blanche ? De l'oublier comme on oublie son nom, sa respiration, sa pensée ? N'être plus l'étrangère. Devenir l'autre, sans peau."
 
Et c'est bien ce que l'on risque, à lire Jacqueline Merville, devenir l'autre, explorer des contrées inconnues, passer à l'autre comme on passe à l'ennemi. C'est une si forte expérience qu'il n'est point besoin, ici, d'en rajouter : quelques personnes voudront lire Jacqueline Merville, afin de faire cette expérience. D'autres, c'est certain, n'oseront jamais.
D'où je suis, je vois la lune, Maud Lethielleux, Editions Stock, 297 p., 18,50 euros.
 
The Black Sunday, 26 décembre 2004, Jacqueline Merville, Editions des Femmes (mars 2005), 91 p., 9,50 euros.
 
Presque africaine, Jacqueline Merville, Editions des Femmes, 74 p., 10 euros.

23/03/2010

Un très bel article (le premier !) sur "Presque africaine" de Jacqueline Merville, par l'excellent Alan Argoul (17.03.10)

Mercredi 17 mars 2010, article d'Alan Argoul  http://argoul.blog.lemonde.fr/2010/03/17/jacqueline-merville-presque-africaine/

Jacqueline Merville, Presque africaine Article repris par Medium4You et cité sur le site de l’auteur.

jacqueline-merville-presque-africaine.1268672519.jpgPresque, parce qu’on ne parvient pas à dire. Presque, parce que l’Afrique, c’est fini ; on n’y reviendra pas. Des bulles de conscience crèvent comme des éclairs à la surface de cet inconscient qui tient à le rester. Pour protéger. Comment se reconstruire, envisager un avenir, après la catastrophe ? Supplice, torture, « l’insensé tombé sur toi ». Est-elle l’auteur, cette femme blanche égarée en Afrique pour voir, comme « toutes celles qui ne cessent de marcher dans le monde » ? Est-ce empathie pour toutes ces femmes qui subissent parce qu’elles sont bâties en trou et non en trique ?

Cette longue nouvelle méditative, poétique, égrène l’indicible. Non seulement ce qui ne parvient pas à sortir de soi pour devenir objectif, mais encore ce que tout le monde refuse obstinément d’écouter. Ce monde, c’est le monde « normal » de tous ceux « qui ne sont pas comme eux, les contents, les contentes, les bien assis, les gentils vivants. » Les stratégies d’évitement sont connues : elle l’a bien cherché, elle n’est pas conforme, déjà rebelle à Creys-Malville contre les hommes en noir que sont les CRS. L’aventure forcée en continent noir, n’est-ce pas la quintessence de ce pouvoir obtus, fondé uniquement sur la force, la domination mâle ?

Il y a du féminisme en Jacqueline, de la révolte contre la brute, la puissance mâle érigée, macho, tricarde, militaire. Les régimes des roitelets noirs apparaissent sous les traits de ce machisme exacerbé, sexe brandi, canon des chars, « pacification » forcée par clouage au sol, si possible en béton pour faire plus mal, plus mâle. Une femme blanche dans la brousse éveille la possession, la revanche du Noir musclé contre la femelle languide, faire taire sa « voix coloniale », celle qui impose, méprise et ordonne. Assouvissement, domination, triomphe de soi – comment dire cette conjonction du sexe, de la passion et des valeurs dans l’Acte ?

Déposition, confession, carnets écrits, rien ne va. Par les flics locaux, le bourreau torse nu est libéré de ses entraves ; la fille qui écoute passivement n’est là qu’une fois ; les carnets usés, noircis d’écriture incohérente, partent en fumée dans une cheminée des Cévennes. Il faut se purifier, dire pour accepter, mais il est dur de dire ce qui ne se dit pas, ce qui ne s’accepte pas. Où fuir ? Dans la durée qui fabrique du souvenir ? Dans l’écriture poétique qui reconstruit une histoire ?

Peut-être est-ce cela, le salut ? Le dire comme ça vient, par bribes et bulles, en recréant l’événement selon une logique absente sur le moment, une logique poétique (de ‘poiesis’ action de faire) seul moyen de la distance avec ce qui vous est arrivé. Le dire pour les femmes blanches, routardes naïves, mais aussi pour toutes ces femmes africaines qui ne peuvent rien dire, faute de mots et de pouvoir.

Car le mot est à peine prononcé, sitôt refusé, mais ce dont il s’agit ici est bien le pire pour une femme : le VIOL !

Lisez ce livre, il vous remue. Même mâle, vous y serez sensible. Nulle description à la Sade, ni scénario comme au cinéma, un viol ne se dit pas comme on décrit le fonctionnement d’une machine. Vous êtes victime, vous êtes dedans, vous êtes clouée. On ne raisonne pas dans ces cas là ; on ressent, on sent, on se sent. Douleurs, odeurs, la peur. C’est évoqué à mots choisis ; suggéré par métaphores.

« C’était en Afrique, elle jouait de la cora.
J’écoutais la religieuse jouer de cet instrument. Je n’étais pas morte. »

Ce n’est pas un haïku, mais y ressemble : tout est dit. Il n’y a au fond que la poésie pour le dire. Jacqueline Merville écrit et peint, colle des papiers comme en Asie ; vous serez heureux de la connaître.

Jacqueline Merville, Presque africaine, mars 2010, éditions Des femmes Antoinette Fouque, 75 pages, 9.5€

01/03/2010

"Presque africaine" de Jacqueline MERVILLE (Nouveauté Salon du Livre de Paris 2010)

PAMerville.JPGPRESQUE AFRICAINE de Jacqueline MERVILLE

 

MARS 2010 FICTION  * Office : 18 / 03 / 2010

ISBN : 9-782-7210-0610-3 * Format 13 x 20 cm, environ 80 pages, 10 €

 

« C’était en Afrique de l’ouest.

La plaie dans ta bouche, au milieu du palais, cuisait, brûlait.

Une plaie faite par le tortionnaire près de la lagune de Glidji.

T’empêcher de parler. T’empêcher entièrement.

Te tuer disait-il.

Tu n’étais pas morte. Tu écrivais sur la feuille de papier quadrillé. Les traces sur ce cahier, du troué, sans forme, irrémédiablement enfoncé à coté de.

Tu n’étais pas folle avec ton visage de folie dans cette chambre de Lomé. Tu écrivais de ton supplice en traversant les pages sans les recouvrir comme un insecte mourant, se débattant contre le mur. Moellons, parpaings de mots.

Qu’est-ce qui s’écrivait aussi sur ce carnet te demandes-tu ? »                                    J.M.

 

 

Dans une langue d’une beauté et d’une poésie rare, brutale et fragile à la fois, Jacqueline Merville nous fait entendre ici la voix d’une femme, voyageuse perpétuelle, qui tente de reconstruire un impossible récit : celui du viol qu’elle a subi, lors d’un voyage en Afrique.  

Elle s’interroge : comment écrire ce qui est d’abord indicible, indescriptible, impossible à écrire ? Comment cela s’était-il écrit, au présent, sur des carnets maintenant détruits ? Comment dire l’inaudible, répondre à la mort de la parole perpétrée par le bourreau, au déni, pour elle, pour toutes les autres femmes ?

 

 

poupou045-custom-size-380-279.jpgElle tente, aussi, de « mettre autre chose dans la mémoire de l’Afrique », de remplacer les images du bourreau, du supplice, par d’autres. Retrouver ses souvenirs, « retrouver celle qui était venue en Afrique », et pouvoir, enfin, la quitter.

En filigrane, cette histoire est aussi le lieu d’une interrogation sur le colonialisme et ses conséquences, la haine raciale, mais aussi sur la haine sexiste, la première, cette haine de l’Autre dont les femmes sont, toujours, les premières victimes, quelle que soit leur race ou leur classe.

 

 

Jacqueline Merville est écrivain et peintre. Elle a publié cinq récits aux Editions Des femmes – Antoinette Fouque, des recueils de poésie, notamment à La Main courante, et dirige depuis 2002 une collection de livres d’artistes, « Le Vent Refuse ». Depuis 1992, Jacqueline Merville partage son temps entre le Sud de la France et l’Asie, en particulier les terres indiennes où elle passe plusieurs mois chaque année.

03/09/2008

Texte de Jacqueline Merville publié dans le catalogue des trente ans des éditions Des femmes

poupou045-custom;size_380,279.jpgJ'apprends, à Tiruvannamalai, que les Editions des femmes publient leur catalogue général. Ce fut une perte pour toutes les femmes, m'étais-je déjà dit en lisant l'arrêt des Editions des femmes dans un vieux numéro du journal Le Monde qui traînait dans un restaurant de Pondicherry il y a quelques saisons. Oui, une perte pour toutes les femmes, ce ralentissement puis cet arrêt des Editions Des femmes.
 
Je me souviens de ma rencontre avec Antoinette Fouque lorsqu'elle m'avait donné rendez-vous à propos de mon premier manuscrit La Ville du non, posté quelques semaines auparavant du ghetto de Vaulx-en-velin où j'habitais. (...)
 
Des femmes écrivent, les Editions Des femmes ont posé l'une des pierres, pierre majeure sur laquelle l'édifice se continue. Souvent clandestinement, hélas...
Je me souviens d'avoir participé à quelques fêtes du livre où au stand des femmes soufflait comme un vent nouveau, radical, promesse d'une langue et d'une écriture nouvelles, celle qui donnerait à lire ce qu'on ne veut pas lire.
Les Editions Des femmes n'ont pas été une simple maison d'édition, c'était plus.
 
Je salue ce soir, dans ce cyber café où les mantras et les ventilateurs font un raga lent et tranquille, ce temps de vraie respiration de l'histoire occidentale où la chose littéraire n'avait pas encore la tête enfouie dans le seau, le seau puant de la loi du profit bien-pensant. Je salue les Editions Des femmes parce qu'elles ont participé à cette vraie respiration, à cette tentative d'avant-garde de l'être... Je me souviens des beaux livres des femmes, ces couvertures blanches, blancheur des fleurs du sel, pour tracer le chemin de ce qui viendra dans longtemps ou jamais : le droit d'etre LUES.
J.M.